Il faut sauver le blessé à tout prix !
Que cela est loin, et pourtant le souvenir reste vivace même dans ce contexte plein d'histoires pas souvent drôles , mais oh combien ! faite de dévouement et d'abnégation dans les instants décisifs, ou il faut faire preuve d'un peu de courage et ne pas trop réfléchir à la suite de ce qui pourrait arriver !!!
L’escadron du 3ème RPC du Colonel BIGEARD, engagé dans cette opération dans les AURES, djebels(montagnes) aux décors d’apocalypse, crapahute (marche,grimpe) vers un sommet, qui domine des falaises abrupts déchiquetées de cette partie du djebel.
BRUNO, indicatif de notre Grand Chef BIGEARD, pour les commandants de compagnies et des radios qui retransmettent les ordres donnés brefs et précis. l'Escadron souffle par l'effort fourni pour atteindre ce point de bouclage, il est vital d'arriver à la cote donnée par le PC, qui forme une partie de l'encerclement des fells surpris par la manœuvre des Paras " les lézards verts " comme ils disent. Au fur et à mesure de l'approche des combats, les grondements des avions en piqués qui larguent leurs roquettes, le bruit de la bataille s’amplifie dans un immense talweg (ravin), et vers 10h je me retrouve sur un" macchabée" fell, il a du être abattu hier par l'aviation qui poussait la Katiba(compagnie) vers les fonds du talweg, il est tout gonflé et du liquide s'échappe de son ventre troué comme une passoire, des millions de mouches vertes couvrent le corps, et d'autres tournoies dans une sarabande sauvage, l'odeur est insupportable, ,nous nous éloignons vite fait .. Mille mètre plus loin, nous prenons position. La bataille est proche, on entend la mitraille, en montant ce piton nous trouvons des fils très fin de métal, ce sont les fils des roquettes téléguidées des bimoteurs de l'armée de l'air qui ont straffés les fells et donnent de toutes leurs armes avant chaque assaut des Paras, toutes les compagnies sont au contact des combattants FLN . Le Capitaine Le Boudec, commandant notre compagnie, fait appeler 4 gars de la compagnie dont mon copain Daniel Belot, pour descendre dans le fond du talweg récupérer un gars du "3" sérieusement touché a la tête, il faut descendre et remonter le gars blessé sur nos positions. les voilà partis en direction du blessé , dans le fond du talweg par un sentier très étroit et caillouteux ou poussent des touffes d'arbuste brulés par le soleil . Et c'est aussitôt engagé dans ce sentier de chèvres, que nous nous faisons allumer copieusement ..!!, là, les balles ne sifflaient pas, elles claquaient autour de nous et nous nous sommes aplatis au sol pour descendre vers le blessé en rampant. Lorsque les balles siffles, ce n'est pas grave, c'est quelles sont passées, mais lorsqu'elles claquent, c'est que c'est tout près et tu peux t'en ramasser une à tout moment ..!l'affaire étant ainsi il faut continuer la progression vers le bas de l'oued, quand un des gus qui était avec nous, accroche son fusil dans une espèce de buisson qui reste coincé, pendant que le gars continu de rouler dans la pente sans son flingue ..!!! Obligé qu'il fasse demi-tour pour aller récupérer son "boukala" (arme) terme arabe . Enfin nous arrivons dans le talweg où nous prenons en charge le blessé qui a pris une balle dans la gorge.!! Maintenant il faut le remonter et sous le feu des fels, nous avons plus que transpiré pour arriver jusqu'au sommet en forme de plateau où se trouvait l'Escadron. Enfin nous sommes arrivés sans qu'il y ait de dégats supplémentaires ..! le blessé à était pris en charge par notre infirmier qui l'a veillé toute la nuit en attendant le lendemain matin qu'un hélico vienne le chercher. Je me rappelle que l'infirmier avait mis un couvercle de boite de conserve petit modèle pour faire compression sur la blessure, il craignait que l'aorte soit touchée, heureusement ce n'était pas le cas.
Nous étions à Bône dans notre base arrière,quand quelques semaines plus tard le gars qui avait été blessé est venu à l'Escadron pour nous remercier de l'avoir récupéré ..